Photo © Jean Marie Jagu pour Angers Nantes Opéra 1 2 scaled

Andy De Groat, Red Notes, Rope Dance Translations & Fan Dance

Propos recueillis par Wilson Le Personnic

Publié le 9 mai 2022

Grande figure de la post modern dance américaine et personnalité de la scène contemporaine française depuis le début des années 1980, Andy De Groat est décédé en janvier 2019. Menée par des anciens collaborateurs du chorégraphe, le CCINP – andy de groat (acrostiche de « centre chorégraphique international de nulle part ») a pour mission de préserver et de valoriser l’ensemble de l’œuvre du chorégraphe. Fruit d’un long travail de recherche et de réflexions, un premier programme réunit 3 pièces emblématiques de la « période américaine » d’Andy De Groat : Rope Dance Translations (1974), Fan Dance (1978) et Red Notes (1977). Cet entretien croisé donne la parole à celles et ceux qui ont mené la conduite artistique de ce projet : Do Brunet, Lilou Magali Robert, Stéphanie Bargues et Martin Barré.

Do, Martin, Stéphanie, Lilou, vous avez été chacun-e interprète pour Andy de Groat et vous composez le collège artistique du CCINP – andy de groat. Pouvez-vous revenir chacun sur votre rencontre avec Andy et votre parcours au sein de la compagnie ? Quels souvenirs gardez-vous de votre passage au sein de la compagnie ?

Do Brunet : Comme ce fut le cas pour beaucoup des interprètes d’Andy, je l’ai rencontré à l’occasion d’un stage. Dans mon cas stage « Danse et Cinéma » (peut être vidéo je ne me souviens plus exactement) à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon, où il était accompagné de Charles Picq pour l’image. C’était en 1983 . Je me souviens d’une homme mince curieux et facétieux, très exigeant, un peu mystérieux aussi. À ce jour le mystère plane toujours. J’ai rencontré alors une équipe d’excellents danseurs et une écriture complexe aux accents cunninghamiens, ma formation principale de l’époque. Je suivais alors quotidiennement l’enseignement de Viviane Serry à la Ménagerie de verre à Paris. Viviane interprète et amie d’Andy, l’avait connu à New-York. Elle est aujourd’hui la présidente du CCINP. La compagnie était alors en création de La petite mort et une danseuse, Cathy Rees, s’est blessée. Andy m’a demandé de la remplacer au pied levé pour une présentation publique, et c’est en raison de cet incident malheureux que ma carrière de danseuse professionnelle a démarré. Il m’a littéralement propulsé, mais j’avoue ne pas avoir compris grand-chose à ce qui se passait à ce moment-là. Je n’ai malheureusement pas eu la joie de participer à une création d’Andy, mais à une folie chorégraphique de Michael O’rourke son compagnon et comparse. Nous n’avons pas travaillé longtemps ensemble, deux ans et demi peut-être et chacun a vogué vers d’autres horizons. Nous ne nous sommes pas revus des années durant jusqu’à ce que je le retrouve via… la vidéo. J’ai réalisé des films courts à partir de ses notes, commandés par le Centre National de la Danse. Ces films pourtant très personnels lui ont plu et j’aime à penser qu’ils lui ont redonné foi en la possibilité d’un rebond artistique, après la pénible époque qu’il venait de traverser. Plus tard j’ai collaboré à nouveau avec Andy pour réaliser un serial à partir de la pièce Cocteau Cocktail créée pour Stéphanie Bargues. Cette seconde rencontre a permis de faire naître ce qui n’était pas présent entre nous en 83, la confiance. On a bien rit, et on a bien œuvré, avec précision et ténacité. Il restera un mystère à jamais sans réponse, que son choix de me faire confiance pour veiller avec Martin Barré, à ce que son œuvre perdure. Je le lis comme une de ces nombreuses impertinences, un de ses pied de nez au monde.

Martin Barré : J’ai rencontré Andy lors d’une reprise de Red Notes et Fan Dance à l’Opéra de Rouen en 2002. Je préparais alors les concours d’entrée aux écoles de cirque et je participais à un atelier de création en danse contemporaine à l’université de Mont-Saint-Aignan, animé par Betty Lefevre et Yann Babault. Andy auditionnait pour cette reprise tous les groupes amateurs de l’académie et c’est comme ça que nous nous sommes rencontrés. Le rencontre fut si forte, humainement et surtout artistiquement que je compris que je n’avais aucune envie d’aller à l’école et que je voulais travailler, et avec cet homme là. Je lui ai demandé comment intégrer sa compagnie et il a rigolé mais quelques semaines plus tard, je recevais un courrier épais avec toutes les propositions de travail qu’il me faisait pour l’année suivante… Je suis alors devenu tour à tour et parfois en même temps assistant personnel, interprète, répétiteur, collaborateur, régisseur.

Stéphanie Bargues : J’ai rencontré Andy en 2002, lors d’une audition. Il cherchait des stagiaires pour la reprise de Red Notes à Odyssud Blagnac. Du haut de mes 19 ans, j’avais déjà écumé de nombreux refus pour intégrer des écoles de formation ou des compagnies. Andy a été le premier à me dire oui et ce oui a marqué un véritable tournant dans la suite de ma carrière. La confiance qu’il donnait à chacun de ses interprètes, enfant, adulte, amateur ou professionnel était extrêmement motrice et sa liberté dans l’acte créatif était contagieuse. Pendant les 3-4 années qui ont suivi cette première expérience, j’allais voir les productions de la compagnie et lui venait voir les miennes, dans des garages ou des mini théâtres, il répondait toujours présent. Puis, j’ai commencé à recevoir régulièrement des coups de fil de Martin, son assistant à l’époque : « Tu veux venir danser en mangeant un hamburger ? », « Tu veux venir faire du air guitar à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon ? », « Ça te dirait de danser Marie-Antoinette à la BNF ? ». C’est ainsi qu’Andy a pris une place singulière dans ma vie d’artiste, mais aussi dans ma vie personnelle. En plus d’être interprète, j’ai commencé à l’assister sur des projets avec des amateurs au Centre National de la Danse, à la MPAA. Un jour que j’avais le moral dans les chaussettes, déchue de l’intermittence, je lui ai parlé de la Voix Humaine de Jean Cocteau, comme ça, autour d’un verre. Une semaine après, je recevais un mail de sa part : il avait réservé des studios de répétition, c’était le début de l’aventure Cocteau Cocktail. Nous avons créé ce solo mêlant danse et voix en 6 semaines, étalées sur 1 an et demi et ponctué d’allers-retours entre Montauban et Paris. Andy était un bourreau de travail. Avec lui, tout était matière à créer, une vidéo de cacatoès, une citation de René Char ou encore, un live de Tina Turner. Tout était toujours lié, en résonance et avec une infinie générosité et de bons gros fous rires. Ce qui m’a le plus marquée dans tout ça, c’est qu’à aucun moment je n’ai réalisé ce que je faisais ou encore, où j’étais, que ce soit sur une scène prestigieuse ou avec des personnes de renom, tout ceci n’avait aucune importance. Ce qui comptait, c’était d’être dans l’instant présent. Sur scène ou dans la vie, Andy était un virtuose en la matière. Aujourd’hui, je décèle sa présence et son inspiration dans mes créations ou dans ma manière de transmettre. Et pourtant, il était loin d’être bavard et ne théorisait surtout pas sur son travail. C’est par sa présence qu’il m’a transmis, c’est par sa présence que j’ai appris à être moi, sans compromis.

Lilou Robert : J’ai rencontré Andy lors d’une audition en 1998 après son installation à Montauban. Il cherchait des danseuses et danseurs pour sa nouvelle création Les enfants de Willy, autour des grands duos de Shakespeare. J’ai été choisie pour être Ophélie. Lors de l’audition je me rappelle d’un homme assez silencieux, énigmatique et très charismatique, très impressionnant pour moi. L’entrée dans la vie professionnelle par le travail d’Andy a été totalement déroutante, inattendue et incroyablement constructive pour mon long parcours d’interprète. Souvent les premières semaines, je ne comprenais ni ce qu’il attendait chorégraphiquement ni ce qu’il disait ! J’ai navigué dans une connexion quasi exclusivement sensible et intuitive pour me connecter à son univers au fil de la création. Puis j’ai participé à des reprises de rôles dans plusieurs de ses pièces les saisons suivantes et je me suis familiarisée avec son imprévisibilité artistique, sa présence tout autant silencieuse que fantasque, son rire que je cherchais à faire surgir comme la plupart d’entre nous, la nécessité du professionnalisme, de l’autonomie. Il aimait les interprètes qui « lâchaient », qui s’engageaient pour laisser toute la place au présent du mouvement. C’est dans ces premières années de travail avec Andy que j’ai commencé à construire, comprendre et oser ma danse, assumer que mon mouvement était celui qu’il était, sans le juger, juste en laissant exister ma singularité.

Pouvez-vous revenir sur la genèse/l’histoire et les enjeux du CCINP – andy de groat et le travail du groupe Groupe de recherche du CCINP ?

Lilou Robert : Au décès d’Andy, nous étions nombreux.ses à nous retrouver ou nous rencontrer pour ses obsèques. Très rapidement, nous avons su que Martin et Do avaient été désignés par Andy pour préserver son œuvre et en garder l’état d’esprit, sans beaucoup plus de précision ! Quelques un.e.s de ses anciens collaborateurs.rices, avec Martin et Do, se sont donc mobilisés pour constituer le Centre Chorégraphique International de Nulle Part (Blague d’Andy lui-même sur sa situation de chorégraphe sans maison de création), association dont le projet se crée et s’invente au fur et à mesure dans son fonctionnement, ses missions, ses enjeux. L’organe de gouvernance artistique est collégial et élu pour 3 ans : il s’agit du Collège artistique. Il a fixé un cap de direction qui se déploie autour d’une période de l’œuvre d’Andy, pour les trois premières années d’existence nous avons choisi la période américaine soit le début de l’histoire artistique d’Andy. Le Groupe de recherche est au cœur de la démarche du CCINP. Il réunit en studio (environ trois semaines par an) un noyau dur de six personnes, mêlant les différentes générations de danseur.se.s ayant traversé le parcours de chorégraphe d’Andy. S’ajoute à ce noyau dur de manière plus ponctuelle, les interprètes ou collaborateur.rice.s associé.e.s à la période ou la pièce en cours d’étude. Il a entre autres pour mission et objectif de travailler autour des archives léguées par Andy à la médiathèque du Centre National de la Danse à Pantin, comprendre son/ses processus créatif(s) et comment transmettre ses pièces. En 2021 et 2022, le groupe de recherche a travaillé entre autres à une ré-émergence mémorielle et corporelle de Red Notes dans le cadre de sa réactivation à Nantes et Angers via Angers Nantes Opéra et le CRR de Nantes puis à la MC93 de Bobigny avec les Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis et le CND.

Le CCINP va présenter une reprise de Red Notes ce printemps, une pièce créée en 1977. Comment est né le désir de remonter aujourd’hui cette pièce en particulier ? Que représente cette pièce dans le répertoire d’Andy de Groat ?

Martin Barré : Le désir de remonter cette pièce vient de deux grands axes : le premier est lié au travail de fond – actuellement en cours – du CCINP sur les années américaines d’Andy. Le deuxième est lié au fait que certaines d’entre nous ont dansé cette pièce lors de sa reprise en 2002 et que nous avons donc les archives et la mémoire vivante pour remonter ce travail. Mais au-delà de ces considérations pratiques, c’est une pièce qui compte particulièrement dans l’histoire individuelle de certaines d’entre nous. Cette pièce à une place spéciale dans le répertoire d’Andy. Tout d’abord, c’est son titre qui servira de nom à la compagnie française d’Andy, ce qui n’est pas rien. Ensuite, elle est le premier grand format créé par Andy suite à sa séparation d’avec Bob Wilson. Elle est un condensé du travail d’Andy : ouverture à beaucoup de types d’interprètes possibles, rigueur des comptes et de la géométrie, liberté et prise de décision sur l’instant, improvisation cadrée.

Comment résumeriez-vous la « période américaine » d’Andy de Groat ? Que représente cette période dans sa carrière ? 

Do Brunet : Andy est né en 1948, les années 70 sont celles de l’élan et de l’innovation. C’est la période fondatrice de son œuvre (la « période américaine » d’Andy de Groat court de 1971 à 1982, ndlr), comme elle le fut aussi pour ceux qu’il croisa, de Bob Wilson à Meredith Monk en passant par les artistes de la Kitchen, les danseurs de Wilson, Julius Eastman ou Yvonne Reiner, pour n’en citer que quelques uns. C’est le temps de l’enracinement et de l’émancipation pour ce jeune homme rebelle, au rythme tourbillonnant d’une génération créative, briseuse des codes artistiques bourgeois. De magnifiques pièces ont ainsi apparu, cousues au fil d’or ou de fer : Rope dance translations pièce de spinning ou Bushes of conduct pour n’en citer que deux, Red Notes bien sûr qui donnera son nom à la compagnie et que nous avons choisi de ré-activer. Cette pièce est représentative du goût d’Andy pour les rencontres amateurs et professionnels s’élançant de concert. Cette période est d’autant plus importante à ré-explorer et à exposer aujourd’hui – et ceci n’engage que moi – que les valeurs de désobéissance, de liberté, et d’autonomie, des humains et des artistes en particulier, sont en péril… Il faut retourner à la pureté de l’enfance et suspendre un peu l’intellectualisme, écrira-t-il. Andy est aujourd’hui méconnu des jeunes générations de danseurs et de journalistes. Pour y remédier, commençons par le début. Commençons par des danses épatantes, exigeantes, défendant une créativité sans à priori et sans concession. Des écritures chorégraphique complexes, architecturées, toujours malicieuses, pour et avec des interprètes personnes-personnages-personnalités, autonomes et libres. Et pour rester debout demain : marcher, marcher, marcher encore, comme l’a si joliment écrit Daniel Conrod (journaliste, écrivain, rédacteur en chef adjoint, chargé des arts et de la culture à Télérama à l’époque, ndlr).

D’un point de vue chorégraphique, quelles sont les spécificités de l’écriture de Red Notes

Martin Barré : Red Notes ne se joue pas pour le public, même si on sait qu’il est là. Et même si l’écriture tient compte de cette présence et de sa place, on joue d’abord Red Notes entre nous. On pourrait même dire qu’on joue à Red Notes comme on joue à un jeu. Andy parlait d’un match de foot sans ballon et avec une seule équipe. Si on joue selon les règles, alors je ne pense pas qu’on puisse un jour s’ennuyer de jouer Red Notes. Sa rigueur liée à toutes les couches de contraintes intenables associée au plaisir d’essayer encore et encore de jouer du mieux qu’on peut avec ses partenaires est pour moi une source de joie inépuisable.

Stéphanie Bargues : LA spécificité chorégraphique de Red Notes, c’est la composition instantanée des danseurs au plateau, le cœur battant de la pièce. Red Notes est un immense terrain de jeu aux règles bien précises. Andy a écrit qu’on pouvait voir ce ballet « comme un match de foot… Jouer avec la complicité d’une seule équipe, sans but, ni ballon ». Ce qui est né avec cette pièce, c’est ce qui deviendra l’identité du travail d’Andy en règle générale, un de ses piliers, à savoir, révéler les interprètes et les amener dans une pleine conscience, un état où les sens sont si éveillés que la liberté dans le mouvement peut apparaître. Le vocabulaire chorégraphique de Red Notes, c’est le métissage de chacune des identités corporelles présentes. Les danseurs, les non-danseurs, les classiques, les contemporains, les jazz, les hip-hop… peu importe ton origine en tant que danseur, ce qui compte ici, c’est que tu danses comme tu sais le faire et surtout, en sachant compter ! La spécificité de Red Notes, ce sont les comptes, un des autres points essentiels du travail d’Andy. Dialoguer avec la musique, l’écouter, connaître tous les tops, textes, musiques, lumières. Ce qui m’amène à dire que Red Notes est aussi, en ce sens là, une pièce « technique ». Technique et graphique. La prise d’espace, les dessins que l’on trace en dansant font également partie intégrante de la chorégraphie. Après l’avoir dansée en 2002, j’ai envoyé une lettre à Andy. À l’époque, je le vouvoyais ce qui a certainement dû l’amuser, cela dit en passant. Je me souviens de lui avoir écrit que « danser Red Notes, c’était danser la vie ». Nous étions 35 sur scène, de Chloé 12 ans à Jean Guizerix danseur étoile de l’Opéra de Paris, en passant par les 7 danseurs de la compagnie, tous de rouge vêtus. Ensemble, nous avons compté, joué, observé, marché (beaucoup marché) nous étions alertes, attentifs, aguerris !

Lilou Robert Le travail mené autour de la pièce , afin notamment de la transmettre, continue à nous éclairer peu à peu sur les spécificités chorégraphiques d’écriture de la pièce. Nous interrogeons dans la transmission le cadre sémantique des improvisations proposées, ce qui était nommé par Andy, ce qui ne l’était pas et fait partie de nos multiples interprétations subjectives et comment à partir de là nous identifions le “suc” commun de la pièce et donc sa nature chorégraphique singulière. La notation en cinétographie Laban de Red Notes commencée par Noëlle Simonet et Vincent Lenfant vient aussi nourrir nos questionnements sur la clarté des consignes d’improvisation qui jalonnent la pièce. Les nécessités de la notation viennent parfois enclencher une réflexion inattendue sur une décision prise de manière collégiale sur le sens d’une consigne. Enfin, pour rebondir sur les réponses de Martin et Steph au sujet de la spécificité de l’écriture de Red Notes, à mes yeux c’est aussi le contraste spatial fabuleux et savoureux entre les WALK ( les marches de la face au lointain qui reviennent 4 fois dans la pièce) et les parties reposant sur des consignes d’improvisation qui révèlent un espace spontané, éclaté et reposant sur l’écoute et les décisions de chacun.e des interprètes au plateau.

Comment avez-vous initié le travail de recherche qui a précédé la reprise en studio ?

Stéphanie Bargues : Nous avons eu recours à de multiples sources d’informations et pour se faire, il nous est apparu nécessaire de créer un cadre, celui du Groupe de Recherche. Ce groupe, dans sa première version, est composé de six anciens danseurs d’Andy, les quatre membres du Collège artistique ainsi que de Cathy Beziex et Pierre Chauvin-Brunet. Ce noyau dur est donc constitué d’anciens collaborateurs issus d’époques bien diverses : Do Brunet et Cathy ont connu Andy dans les années 80, Lilou Magali Robert fin des années 90-début des années 2000, Martin Barré et moi des années 2000 à 2015 et Pierre en 2012. La multiplicité des générations ici représentées nous a semblé être un élément essentiel à la tentative de reconstitution de l’univers d’Andy, si singulier et multiple. 

Do Brunet : Chronologiquement, il y a eu en amont un travail engagé depuis plusieurs mois par notre Groupe de Recherche, groupe composé de 6 danseurs de différentes générations auxquels se joignent ponctuellement des invités (danseurs, ou artistes voisins). À l’occasion des sessions de travail de ce groupe nous fouillons les archives papiers, interrogeons les mémoires, visionnons des vidéo de Red Notes mais également d’autres pièces de la période dite américaine d’Andy. Nous interrogeons les danseurs américains d’origine via des visio-conférence avec les USA. Nous en extrayons de précieuses informations afin de s’accorder sur la méthode de ré-activation de la pièce. Au présent il y a, le groupe des « pros » qui vont commencer à travailler ensemble fin mars. Ainsi que deux groupes « d’amateurs » qui sont en cours de répétition-transmission ; un groupe à Nantes constitué de danseurs du conservatoire de Nantes, et un groupe à Pantin composé de danseuses des conservatoires de Bobigny et Aubervilliers ainsi que de danseurs.ses répondant à un appel à participation , de tous âges et de tous horizons. Ce groupe vient tout juste de se rencontrer avec une formidable énergie. des curieux, des enthousiastes. Nous expérimentons avec eux notre méthodologie de transmission, ils en sont partie prenante, soulevant parfois des questionnements imprévus…

Stéphanie Bargues : La ré-activation de Red Notes a officié ces premières semaines de recherche que nous avons consacrées à la période dite « américaine » : des années 70 à son installation en France en 82 (Swan Lac). Durant ces 4 semaines, réparties d’avril 2021 à janvier 2022, nous avons essayé de créer un protocole de recherche reposant sur les « archives vivantes » ou la récolte du vécu et des connaissances de chacun sur le travail d’Andy, sur les archives papiers (notes, dessins, photos…) et sur les vidéos. Le recueil des témoignages d’anciens danseurs (Jean Guizerix, Viviane Serry, Sara Lindon, Sheryl Sutton, Michael O’Rourke…), administrateurs (Frédéric Nauczyciel), créatrices lumières (Carol Mullins), vidéaste (Robyn Brentano) mais aussi, conférencières (Christine Rodes) en France comme aux Etats-Unis a été riche d’enseignements et d’émotions. Les souvenirs ont refait surface avec plus ou moins de fluidité, selon les personnes, par l’expérimentation dans le corps pour certains, et par la parole pour beaucoup, et grâce à la visioconférence. Nous avons notamment découvert que les mots confiance, responsabilité et liberté ressortaient des deux côtés de l’Atlantique.

Avez-vous travaillé à partir des archives de la compagnie ?

Stéphanie Bargues : Bien sûr, les innombrables archives conservées par Andy au fil des années – et qui sont à présent à la médiathèque du Centre National de la Danse à Pantin – ont été une autre ressource pour aborder le travail. Une infime partie de ses textes, notes, schémas, dessins ont été épluchés, les archives vidéos ont été (et sont encore) analysées, comparées. Pour Red Notes, nous nous sommes nourris des images existantes des différentes versions de la pièce : la version création avec les étudiants des Beaux-Arts à Halifax, les versions « compagnie » avec les 8 danseurs de la compagnie Andy de Groat and Dancers, les versions mélangeant amateurs et professionnels (à l’Opéra de Rouen et à Odyssud Blagnac en 2002). Nous avons également ouvert notre regard sur les pièces situées « autour » de Red Notes : Rope Dance Translations, Cloud Dance, Angie’s Waltz, Bushes of Conduct, Hasards Naturels… Nous avons établi des grilles de lectures, au sens propre comme au sens figuré, afin d’avoir une vision plus globale de Red Notes et de son inscription dans cette période si riche et foisonnante de l’œuvre d’Andy. Mais le groupe de recherche est avant tout un espace d’expérimentation où la mémoire est ravivée par la danse, par le sensible, par la recherche corporelle. Encore une fois, Andy n’était pas un homme de mots ; quand nous rentrions en studio, nous ne discutions pas, nous nous mettions directement dans l’action.

Le CCINP va également présenter Fan Dance, une pièce créée en 1978, qui est régulièrement transmise à des groupes d’amateurs ou de jeunes professionnels. Que représente cette pièce dans le répertoire d’Andy de Groat ? Pouvez revenir sur l’histoire de cette pièce ?

Martin Barré : Fan Dance a été créée l’année après Red Notes, en 1978, et se base sur les mêmes comptes pour les marches. Entre les mythologie à versions divergentes en fonction des gens – certains disent qu’Andy aurait vu une cérémonie de l’éventail lors d’un voyage en Iran – et la réalité d’un travail déjà initié en amont – d’autres pièces avant Fan Dance sont à base de comptes croissants-décroissant, d’aller-retour et de géométrie – je ne sais pas s’il est possible de raconter une histoire juste pour cette pièce. Fan Dance est sans doute la pièce d’Andy la plus jouée, la plus transmise et la plus connue. La possibilité de jouer dans beaucoup de lieux, de 4 à une infinité (théorique) d’interprètes et sa courte durée ont sans aucun doute contribué à sa diffusion exceptionnelle. Sans parler de sa beauté. Le plus impressionnant, ce n’est pas combien de fois les éventails ont été dansés mais bien par combien de personnes. Sa courte durée et sa délicatesse, comme un poème dansé, trompent souvent les spectateurs et les futurs interprètes sur la difficulté de son apprentissage. Il faut en effet travailler de nombreuses heures pour pouvoir danser ces quatre minutes.

Do Brunet : Fan Dance c’est une aventure chorégraphique et pédagogique. Une aventure humaine de par le monde, qui relie depuis 1978 un nombre incroyablement grand de danseurs professionnels et amateurs, de tous âges, à travers le temps – passé présent et à venir. Une danse des planètes d’Andy en quelque sorte. La gestion de l’espace est complexe, en perpétuel modification. Les moments de liberté de chacun des interprètes (liberté et/ou improvisations) bouleverse et place chaque interprète dans une vigilance et une responsabilité extrême . De mon point de vue c’est un véritable manifeste, une ode au mouvement.

Vous avez chacun.e régulièrement transmis Fan Dance à des groupes d’amateurs ou de jeunes professionnels. D’un point de vue chorégraphique, quelles sont les spécificités de l’écriture de Fan Dance

Martin Barré : Fan Dance s’apprend par couche : les parcours, les bras, les groupes, les arrêts, les improvisations. Toutes ces couches de contraintes réclament une attention de tous les instants et une présence sans faille. Il faut ensuite beaucoup de pratique pour intégrer tout cela en un ensemble fluide et cohérent et faire confiance au temps pour que la pièce se dépose en chaque interprète. Les choix individuels instantanés, les improvisations mais aussi le nombre d’interprètes et l’espace font que chaque Fan Dance est unique. Cette unicité fait qu’on peut danser Fan Dance chaque fois avec un plaisir renouvelé.

Stéphanie Bargues : Au risque de me répéter, ce qui me semble spécifique, ce sont les comptes ! Fan Dance a été créée en 1978, juste après Red Notes et est venue s’intégrer à la pièce, comme une « extension ». Elle s’est d’ailleurs intitulée un temps « En attendant Godot ». La base des comptes marquant les marches dans Red Notes est la même que celle de Fan Dance : 4-4,5-5,6-6,7-7,11-11,4-4,11-11. Ici aussi, la structure de l’espace vient signer une certaine identité chorégraphique. En effet, le cycle de marches linéaires et courbes vient se reproduire quatre fois dans quatre directions différentes. Le croisement des deux groupes vient accentuer l’aspect graphique de la pièce. Andy parlait de Fan Dance comme d’un « puzzle chinois ». Comme dans Red Notes, l’équilibre de Fan Dance réside dans le dialogue entre le respect des consignes et les temps d’improvisations. C’est ce fin et fragile dialogue qui vient créer l’espace de liberté de l’interprète. L’écoute du groupe est absolument essentielle, ne serait-ce que pour ne pas se percuter ! Enfin, comment ne pas parler de Fan Dance sans parler de la musique de Michael Galasso. Pour moi, il s’agit également d’une spécificité de la pièce. Au moment de sa création, Michael et Andy se connaissaient déjà et avaient collaboré sur Rope Dance Translations (1974). Andy a toujours composé ses pièces en partant de l’écriture même de la partition musicale. C’est comme s’il faisait en fonction d’elle, de ses accents, de ses mesures, mais aussi, de ses imperfections. La version de Fan Dance utilisée par Andy pour les représentations et que tous les transmetteurs continuent d’utiliser, est une version issue d’une répétition et non, une version studio. Cette « version répétition » comporte plein d’aspérités, un souffle irrégulier, une organicité bien spécifique et unique. Il y a même une accélération qui apparaît en plein milieu du morceau et qui a mis en difficulté, grand nombre d’apprentis Fan Dance, dont je fais partie ! Tout cela pour dire que la partition de Fan Dance a sans doute été écrite avec la musique de Michael Galasso, je dis bien « avec » et non « sur » la musique, le reste appartient aux danseurs…

Rope Dance Translations a pour particularité d’être dansé avec une corde. Pourriez-vous revenir sur l’histoire de cette pièce ?

Martin Barré : Comme plusieurs des projets d’Andy, Rope Dance Translations garde une certaine part de mystère malgré les archives que nous avons pu consulter. On date la création en 1974 mais on ne sait exactement où la pièce a été créée. Andy et Bob habitaient à cette période dans un loft à Soho, comme la plupart des artistes new-yorkais de cette époque-là, et on sait qu’ils présentaient régulièrement les uns chez les autres des expositions ou des performances underground. C’est tout à fait possible que Rope Dance Translations ait été présenté pour la première fois dans un appartement privé dans le cadre d’un événement. Les histoires divergent selon les témoignages. Nous avons aussi retrouvé quelques articles de presse qui en parlent, donc la pièce a eu pas mal de visibilité aux États-Unis et en Europe jusqu’à la fin des années 70. Rope Dance Translations découle d’un motif très présent dans le travail d’Andy : le mouvement tournant. Andy pratiquait le « spinning » sur de très longues périodes avec des vitesses parfois extrêmes, c’est d’ailleurs très impressionnant à voir en vidéo. De cette pratique est née l’envie de rendre visible des lignes de force qui viennent avec cette rotation. On ne sait pas qui a rapporté les cordes en studio et combien de temps a duré cette recherche. En reste cette fameuse triple corde qui continue aujourd’hui d’être un accessoire qui offre toujours des surprises : il y a énormément de dessins et de recherches qui sont possibles en fonction du placement des bras et de la vitesse de rotation. Andy souhaitait que chaque interprète puisse explorer sa propre relation avec la corde, ce qui donnait lieu à des versions différentes à chaque nouvel interprète. Lorsque j’ai dansé Rope Dance Translations, Andy ne m’a jamais montré de vidéo à laquelle me référer. Il existe de nombreuses versions de cette pièce et nous savons que les archives n’attestent que de la partie émergée de l’iceberg : Andy était tout le temps en train de tester de nouvelles choses, donc il y a des versions en silence, des versions sur de la musique répétitive, sur des tubes pop de l’époque, des solos, des quatuors, etc.

Comment pourriez-vous résumer la pensée chorégraphique particulière à Andy de Groat ?

Martin Barré : Question compliquée. Pour moi, le travail d’Andy c’est d’abord le résultat avant tout (pas à tout prix, attention). Seul ce qu’on voit compte. Il faut avoir du fond – Andy travaillait énormément en amont – et du sens mais puisqu’on ne parle pas, au final seul ce que voit le spectateur compte. On n’écrit pas pour les spectateurs (pour leur plaisir) mais on n’oublie jamais que l’on écrit pour les spectateurs (à leur attention). Cette concentration sur l’objet final de la composition faisait qu’Andy n’avait aucun a priori stylistique ou technique : costume ou pas, classique ou hip-hop, démodé ou avant-garde, savant ou populaire, bon goût ou mauvais genre… Tout cela semblait secondaire par rapport à son envie de mettre en relation des corps, des matières, des musiques, des couleurs et de voir si oui ou non, la composition est bonne. Bonne pour lui à l’instant fatidique mais nécessaire de la première, bonne à présenter à un public sans avoir honte. Et à partir de là, retravailler sans cesse pour affiner, tester, polir son travail et continuer à chercher sans relâche au sein de la pièce, dans celles du passé et dans celles à venir.

Stéphanie Bargues : « Résumer » est un verbe bien difficile à associer à Andy et à sa pensée… Alors, j’aurais envie de parler de curiosité, d’ouverture, de rien qui ne ressemble de près ou de loin à une catégorie, de multitude, de bazar organisé ou de cabinet de curiosité, de tout et de tout le monde, de Aretha Franklin, Chopin, The Prodigy, de sauter, marcher, regarder avec ses oreilles ! Sa particularité chorégraphique résiderait dans l’art qu’il avait de mettre en valeur la particularité de chacun des interprètes, de chaque note de musique, de chaque accessoire utilisé, perruque portée, maquillage choisi, sa particularité de ne rien laisser au hasard, d’avoir le souci du détail pour mieux laisser jaillir l’inconnu, le possible et le doux mot de liberté.

Lilou Robert: Sa pensée chorégraphique était en perpétuel mouvement et vu le nombre d’œuvres créées, et le grand écart qu’il peut paraître y avoir au premier abord entre elles , il m’apparaît difficile de la résumer! Pour moi, la soixantaine de pièces composant son œuvre est simplement à son image: inclassables, provocatrices, malicieuses, exigeantes, pudiques, sans concession; il était toujours là où on ne l’attendait pas au sens propre comme au figuré. En tant qu’interprète, ce qui m’a le plus marqué de sa singularité chorégraphique c’est le “jeu”, il y a toujours un jeu chez Andy, dont l’interprète est au centre, entre la musique, l’espace, la lumière, les costumes.

Quels sont les prochains projets que va porter CCINP – andy de groat ?

Stéphanie Bargues : Plusieurs projets sont en chantier. Tout d’abord, celui de poursuivre l’axe artistique défini pour les 3 premières années de l’association, à savoir, la période américaine ; continuer les échanges outre-atlantique, les pérenniser dans l’idée d’aboutir à un projet commun, la réactivation d’une autre pièce de cette période à Paris et aux Etats-Unis (New York, peut-être ?!), en simultané ou en mixant danseurs américains et français ? Nous continuons de rêver à ce sujet. Autre chantier, celui de développer le travail du Groupe de Recherche et de partir à la rencontre de soutiens, comme celui de la DGCA qui est précieux dans sa mission de traitement et de valorisation des archives. Depuis la disparition d’Andy, de nombreuses sollicitations ont fleuri pour des remontages de Fan Dance et de sa version Sylvester, pour des ateliers autour de Swan Lac. En effet, Andy est présent dans deux thématiques du nouveau programme art danse, devenu un enseignement de spécialité (le courant artistique de la post modern dance et les ré-interprétations du Lac des Cygnes). Le CCINP et nombre des collaborateurs d’Andy ont eu à réagir et à rebondir sur ce si bel élan. Il est temps aujourd’hui de poursuivre la réflexion et la structuration des différentes missions de transmission, de diffusion et de préservation de sa mémoire afin que chacun puisse « connaître ou redécouvrir l’écriture chorégraphique, la pensée et l’impulsion de ce chorégraphe américain qui avait choisi la France comme pays de création ».

Do Brunet : Beaucoup de souhaits, difficiles à mettre en route pour le moment, mais il est certain que ça turbine dans nos têtes et que nous en parlons régulièrement. Le fonctionnement bénévole du Collège Artistique, ne nous permet pas de dédier de temps supplémentaire, pour le moment, à ce super projet. Il nous faut donc apprendre la patience. En plus des projets cités précédemment, nous envisageons aussi, de ré-activer une autre pièce de la période américaine avec un jeune ballet ou une compagnie de répertoire. Et l’envie de réaliser un documentaire, archive des archives est présente. Pour le moment nous engrangeons des images, et des sons de la reprise de Red Notes et des périodes de recherche, et profitons de nos temps de travail pour susciter des discussions avec les anciens, danseurs ou collaborateurs ainsi qu’avec la nouvelle génération que nous invitons à questionner et chercher avec nous au sein du groupe de recherche. Celui-ci va continuer à se réunir le plus régulièrement possible, car nous travaillons à une méthodologie de transmission des œuvres, ainsi qu’au décryptage des archives pour pouvoir constituer des « boîtes à outils » par pièce. Nous creusons, nous fouillons et nous trouvons. Andy c’est une mine d’or à découvrir et faire connaître.

Red Notes / Rope Dance Translations / Fan Dance, vu au Théâtre Graslin / Angers Nantes Opéra, présenté dans le cadre d’une coproduction entre Angers Nantes Opéra et le Conservatoire à rayonnement régional de Nantes. Chorégraphies Andy De Groat, textes et musiques Gertrude Stein, Philip Glass et Michael Galasso. Réactivation le CCINP – andy de groat. Regard extérieur Stéphanie Bargues, régie générale Éric Fassa, costumes Suzanne Veiga Gomes, transmission aux stagiaires Stéphanie Bargues et Martin Barré. Photo © Jean-Marie Jagu pour Angers Nantes Opéra.

Red Notes / Rope Dance Translations / Fan Dance est présenté le 31 mai au Quai à Angers puis les 17 et 18 juin à la MC93 de Bobigny dans le cadre des Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis et de Camping au CN D.

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