Par Wilson Le Personnic
Publié le 16 octobre 2015
Noé Soulier est aujourd’hui une figure incontournable de la jeune scène chorégraphique contemporaine. Formé au Conservatoire de Paris, à l’École Nationale de Ballet du Canada et à P.A.R.T.S., il construit depuis plusieurs années un parcours singulier dans le paysage français et international. Ses pièces interrogent la manière dont on perçoit, interprète et projette les gestes dans l’espace, croisant recherches théoriques et expérience sensorielle.
Dans la continuité de ses précédentes créations, Noé Soulier poursuit avec Removing son exploration du geste dépouillé. Les mouvements y sont fragmentés, dissociés de tout but fonctionnel, comme frappés d’amnésie de leur finalité pratique. Il en résulte une partition minimale, impulsive et imprévisible, dénuée de narration, exécutée en solo ou à l’unisson par six danseurs virtuoses. Le mouvement pour le mouvement, sans concept plaqué, sans surcharge ni débordement : les corps bondissent, chutent, vrillent, tournoient dans l’espace avec une acuité rare. Disposés aux quatre coins du plateau, des micros captent et amplifient les sons des chocs, des courses, et le froissement des vêtements sportwear noirs et fluos, composant une matière sonore brute et immédiate.
Pas une seule fois les danseurs n’entrent en contact, à l’exception d’un remarquable duo inspiré du jiu-jitsu brésilien, où les prises articulaires et les glissements au sol prennent l’allure d’une vigoureuse étreinte chorégraphique. Cette séquence, également présentée comme une performance autonome sous le titre Grabbing, Pushing, Thrusting, révèle une sensualité contenue au sein d’une technique millimétrée. Brillant de maîtrise, Removing confirme la capacité de Noé Soulier à déployer de nouvelles cartographies sensibles du geste, où chaque mouvement devient un élément d’une écriture précise, fondée sur la dynamique corporelle et la perception du geste.
Vu au Théâtre de la Bastille. Photo Chiara Valle Vallomini.