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Portraits d’été : Abigaïl Fowler

Propos recueillis par François Maurisse

Publié le 30 août 2017

Pour certains, l’été est synonyme de repos, pour d’autres, il bat au rythme des festivals. Quoi qu’il en soit, cette période constitue souvent un moment privilégié pour prendre du recul, faire le point sur la saison écoulée et préparer celle qui s’annonce. Nous avons choisi de mettre à profit cette respiration estivale pour aller à la rencontre des artistes qui font vibrer le spectacle vivant. Artistes confirmés ou talents émergents, ils et elles ont accepté de se raconter à travers une série de portraits en questions-réponses. Cette semaine, rencontre avec Abigaïl Fowler.

Quel est ton premier souvenir de danse ?

Mon petit frère et ma mère qui dansaient sur « Chic Planète » de L’affaire Louis Trio. Et les jeunes danseurs hip hop qui squattaient au forum des Halles, avant sa reconstruction, juste au-dessus de la place Carrée.

Quels spectacles t’ont le plus marquée en tant que spectatrice ?

Mon amour (2008) de Christian Rizzo, Park (1998) de Claudia Triozzi, la création de Vera Mantero avec les étudiants du CNDC en 2007, Souffles (2010) de Vincent Dupont, This is How You Will Disappear (2010) de Gisèle Vienne.

Parmi toutes tes collaborations, lesquels te laissent les souvenirs les plus forts ?

Cette saison, pendant les périodes de résidence avec Volmir Cordeiro et Gaëlle Bourges, j’ai vécu des moments particulièrement forts. Une vraie sensation d’être pleinement intégrée dans un processus. Ma collaboration avec Danya Hammoud, tout comme celles avec Madeleine Fournier et Jonas Chéreau, m’ont beaucoup nourrie. Elles m’ont amenée à réfléchir à une dramaturgie spécifique à la lumière. Il y a aussi des souvenirs plus précis : une création lumière dans une patinoire olympique en plein été et en plein jour avec 35 adolescents orléanais, puis une autre dans l’église des Célestins à Avignon pendant l’hiver, avec 20 choristes, dans un esprit de créativité et de bienveillance insufflé par Mickaël Phelippeau. Je pense aussi à la reprise d’À mon seul désir de Gaëlle Bourges à Avignon, où j’ai finalisé la lumière de la scène finale jour après jour, avec un public de plus en plus réceptif. Et puis, la représentation de Sous-Titre de Madeleine Fournier et Jonas Chéreau à Valenciennes, juste le lendemain des attentats du 13 novembre 2015. On était tristes, on avait peur, mais on a tenu à jouer. C’était très chargé, mais il fallait le faire.

Quelle collaboration artistique a compté le plus dans ton parcours ?

Je ne peux pas vraiment hiérarchiser. J’ai eu la chance de vivre de très belles collaborations avec des artistes formidables. Chaque création compte, au moment où elle a lieu, dans les résidences, puis dans ce qu’elle laisse après. Même en passant d’un projet à l’autre, je porte toujours un peu du précédent. À un moment, quelque chose s’impose, alors l’écriture peut commencer.

Peux-tu partager quelques œuvres qui composent ton panthéon personnel ?

Love (2003) de Loïc Touzé, Big Bang (2010) et La Mélancolie des dragons (2008) de Philippe Quesne, enfant (2011) de Boris Charmatz, Quatorze (2007) de David Wampach, Germinal (2012) d’Antoine Defoort et Halory Goerger, Guintche (2010) de Marlène Monteiro Freitas.

À tes yeux, quel rôle doit avoir un artiste dans la société aujourd’hui ?

Celui qu’il ou elle se définit. Certains veulent secouer le monde, d’autres le faire rire, réfléchir, rêver… Il y a de la place pour tout ça. Vouloir être partout, répondre à tout, peut devenir contre-productif, voire dangereux. Un·e artiste doit d’abord trouver son propre langage, son aire de jeu. Ce qu’il ou elle a besoin, c’est d’un vrai soutien. Parce qu’on s’expose énormément.

Photo Antoine de Gromard