Photo Chloe Dabert

Chloé Dabert « L’écriture de Dennis Kelly a quelque chose d’organique, d’instinctif… »

Propos recueillis par Wilson Le Personnic

Publié le 7 avril 2016

Issue du Conservatoire national supérieur de Paris, la jeune metteur en scène Chloé Dabert est aujourd’hui artiste associée au Centquatre-Paris et y présentera ces prochaines semaines deux pièces : Orphelins (Prix du Jury Festival Impatience 2014) et sa nouvelle création Nadia C en partenariat avec la Comédie Française.

Ce n’est pas la première fois que vous adaptez une pièce de Dennis Kelly, qu’est-ce qui vous intéresse dans l’écriture de cet auteur ?

L’écriture de Dennis Kelly a quelque chose d’organique, d’instinctif, c’est vraiment un théâtre d’acteurs. Il reste toujours suffisamment en distance pour permettre l’humour, même dans les situations les plus violentes, avec un grand sens du rythme et des ruptures. Ses pièces sont toujours assez difficiles à définir, par exemple, on ne peut pas réduire Orphelins à un thriller psychologique, c’est également une comédie, une tragédie… C’est très stimulant pour les acteurs, car ils ne peuvent jamais s’installer, ils sont toujours sur un fil, passant sans cesse d’un registre à un autre, cela les obliges à être toujours au présent, c’est un travail ludique qui les rends très vivants.

Qu’est-ce qui vous a motivé à mettre en scène Orphelins ?

Je trouve que Dennis Kelly est un auteur passionnant autant dans le fond que dans la forme. Orphelins est une pièce qui soulève, selon moi, des questions essentielles tout en nous laissant la place de nous positionner nous même en tant qu’individu. Ce n’est pas un texte qui donne des leçons ou des réponses, la pièce à plusieurs entrées, plusieurs sujets : le couple, la famille, la culpabilité, la responsabilité, la peur de l’autre, des autres, l’ignorance, la violence… c’est une réflexion sur notre société, sur l’individu et ce qui le construit, ce qui le pousse à faire un choix plutôt qu’un autre.

L’écriture de Dennis Kelly est très rythmée, incisive. Les personnages ne s’arrêtent presque jamais de parler, se répondent du tac au tac. Comment avez-vous abordé le texte avec les comédiens pendant les périodes de répétition ?

Dans un premier temps, nous nous sommes appliqués à en respecter scrupuleusement tous les temps, les silences, les pauses… et avons poussé d’une manière assez radicale les moments où il n’y en a pas. Nous n’avons travaillé que sur le rythme et la ponctuation, comme une partition musicale, pendant assez longtemps, en cherchant le plus de précision possible dans l’exécution d’un travail donc assez technique. Cela permet de ne pas se fermer sur une interprétation dès le début du travail, mais de laisser le texte agir sur l’acteur avant de faire des choix.

Le dispositif scénique et le décor introduisent le spectateur au plus près des comédiens, ces choix sont-ils apparus des le départ ?

Oui, l’idée que les comédiens soient au milieu de nous et en gros plan comme avec une caméra est apparue dès le départ. L’acteur est le centre, le point de départ du travail. Ce dispositif permet également plusieurs angles de vues ; en fonction de l’endroit où on choisit de s’asseoir on sera plus ou moins en empathie avec l’un ou l’autre des personnages, et on peut choisir d’être dans le dispositif, avec eux, ou de se mettre plus en retrait.

Vous avez été invitée par Eric Ruf, administrateur de la comédie française, à mettre en scène Nadia C (La petite communiste qui ne souriait jamais). Comment s’est effectué le choix du texte de Lola Lafon et celui de la distribution ?

Je connais Suliane Brahim, qui est pensionnaire à la comédie française, depuis longtemps, et nous avions très envie de travailler ensemble. En lisant ce livre, j’ai tout de suite pensé à elle, elle a été enthousiaste, nous en avons parlé à José Manuel Gonçalvès au Centquatre et à Eric Ruf à la Comédie française, et ils nous ont proposé de monter ce projet, dans le cadre de leur partenariat autour des nouvelles écritures.

Photo © Héros limite