Photo Emilia Milewska

Bend, Meg Stuart & Keith Hennessy

Par Guillaume Rouleau

Publié le 5 août 2016

Annoncée comme une « one-time-only experiment in dancing, friendship and performance » par et avec Meg Stuart et Keith Hennessy, la performance improvisée du 30 juillet 2016 au Kasino am Schwarzenbergplatz effectuée à l’occasion de ImPulsTanz – Vienna International Dance Festival avait de quoi retenir l’attention : par la réunion de ces deux noms, l’unicité de la performance et ce qui était performé. La chorégraphe et danseuse américaine et le « award wining performer », chorégraphe et enseignant Keith Hennessy, vu aux côtés des Peaches lors d’une soirée mémorable au MUMOK (27.07) et à la soirée Impulstranz pour une performance anti-internet (29.07), avaient intitulé cet événement Bend (« courber », « plier », « pencher »).

Les deux amis se sont pliés à cet exercice, périlleux dans l’imprévu des interactions entre partenaires, avec le public mais qui a été une démonstration d’inventivité décontractée, à l’image de l’illustration sur le programme, deux palmiers courbés vus en contre plongée sur fond de ciel bleu. Des palmiers que l’on retrouve sur scène, en miniature dans des pots. Une barre lumineuse traversant en diagonale le sol noir : une démarcation aux pieds de Klaus Janek, sur la gauche, qui improvisait quant à lui à la contrebasse. Le rythme du pincement des cordes s’accordait aux chocs des débuts, lorsqu’entrant sur scène après s’être échauffés sur le côté, visibles du public, Meg Stuart et Keith Hennessy commencent à se bousculer en s’amadouant. Une confiance qui engage dans un « contact improvisation » tel que Steve Paxton et Nancy Stark Smith ont pu le définir au début des années 1970 mais avec une désinvolture, une « coolness » de côte ouest américaine en 2016. Un contact improvisation en duo, jouant sur les points de contacts voulus, accidentels, ou une absence de contacts tactiles mais qui subsistent par les autres sens : un regard jeté à l’autre, un son émis.

Le mot bend exprime bien ce que Meg Stuart et Keith Hennessy déployaient avec Klaus Janek. Se plier aux attentes de l’autre, plier l’autre à ses attentes mais aussi former une « bande » à part. Une bande qui utilise une gestuelle riche, adaptable à toutes les circonstances. Une bâche argentée servira de tapis de sol pour une conversation entre les deux danseurs à propos de leurs « animaux totems » d’un soir, une tortue pour Hennessy (un animal qui vit dans un environnement extrêmement compétitif en feignant de ne pas y prendre part, sa maison sur le dos), un furet pour Meg Stuart. Un moment durant lequel se manifeste les imprévus de la performance (la longue hésitation de Meg Stuart quand Keith Hennessy lui demande quel est son « animal totem »). Une performance improvisée qui se déplie à partir d’une structure préétablie (le nombre de personnes sur scène, la scénographie, les sons, etc) : prendre la parole, prononcer certains mots, utiliser un objet de la salle comme un extincteur, initier un solo, etc. Meg Stuart et Keith Hennessy se sont mis à nus durant une heure avec un humour communicatif face au public composé majoritairement de professionnels venus pour ImPulsTanz. Un humour qui tenait notamment au sourire de Keith Hennessy, au pince sans rire de Meg Stuart, à l’estime et l’amusement qui circulaient entre eux. Bend a été une suite réussie de pirouettes. Une démonstration d’amitié sur scène à laquelle le public s’est plié volontiers.

Vu au Kasino am Schwarzenbergplatzdans le cadre d’ImPulsTanz. Avec Meg Stuart et Keith Hennessy. Musique Klaus Janek. Photo Emilia Milewska.