Photo Marc Coudrais

7 pleasures, Mette Ingvartsen

Par Wilson Le Personnic

Publié le 20 novembre 2015

Après une série de spectacles et d’installations autour des représentations et perceptions de la nature, la chorégraphe danoise Mette Ingvartsen poursuit ses réflexions sur « le corps et ses extensions » avec un nouveau cycle de recherche autour de la sexualité dans notre société. Apres avoir questionné notre rapport à la nudité et la sexualité dans la sphère publique dans le solo 69 positions (2014) en interagissant nue au milieu du public, la chorégraphe présente aujourd’hui sa nouvelle création 7 pleasures, qui, comme son nom laisse le supposer, explore sept notions de plaisir.

Un puissant beat résonne déjà avant de rentrer dans la salle et accueille les spectateurs jusqu’à leurs sièges. Le public bavarde fort pour couvrir le bruit ambiant jusqu’à ce qu’un homme se lève parmi le public et commence à se déshabiller avant d’être imité par une dizaine de personnes assises et disséminées dans les gradins. On les regarde timidement se dénuder et enjamber des spectateurs afin de rejoindre un espace domestique moderne et rudimentaire présent sur la scène. Dans un coin du plateau, ils forment un agglomérat de corps qui se liquéfie en magma organique : une vague de corps se déverse lentement sur le sol et submerge un canapé, engloutit ensuite une table et termine son flot sur un petit fauteuil en cuir.

Sans ascendance logique ni unité précise lisible, les performeurs traversent ensemble plusieurs phases sensorielles pendant lesquelles ils activent des objets mobiles présents sur le plateau : un ventilateur, une plante, un rideau de fil, des chaises, des luminaires suspendus, un tuyau d’arrosage… Le potentiel sexuel des objets offrent des images saisissantes, entre beauté figurative et abstraction plastique des corps. Les danseurs se chevauchent, se touchent et agitent leurs corps galvanisés par les percussions frénétiques du musicien Will Guthrie. Des bribes de Salò ou les 120 Journées de Sodom de Pier Paolo Pasolini nous viennent à l’esprit, impossible également de ne pas y voir des évocations au fétichisme ou aux pratiques SM lorsque des danseurs, simplement habillés de noirs, manipulent des vêtements et des corps nus dociles.

Le pouvoir des images créées par Mette Ingvartsen est sans limite, la chorégraphe anime et attise notre imaginaire commun à travers des séquences aux lectures multiples, 7 pleasures a l’habileté de nous questionner aussi bien sur la nature réelle de ses images que sur les fantasmes qu’on projettent dessus.

Vu au Centre Pompidou dans le cadre du Festival d’Automne à Paris. Conception et chorégraphie Mette Ingvartsen. Lumière Minna Tiikkainen. Musique et Son Peter Lenaerts. Musique de Will Guthrie (Breaking Bones). Photo Marc Coudrais.