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Des paradis, Kevin Jean

Par Wilson Le Personnic

Publié le 18 avril 2016

Accrochée à la branche d’un arbre robuste dans le cadre bucolique d’un parc ensoleillé ou dans l’architecture noire et feutrée d’un plateau de théâtre, c’est suspendue dans les airs que nous avons eu l’habitude de voir flotter la silhouette de Kevin Jean. Après s’être suspendu par les pieds dans le solo La 36ème chambre (2011) ou par un bras dans le trio Derrière la porte verte (2012), sa dernière pièce Des paradis marque comme un retour à la terre. Le danseur et chorégraphe continue d’explorer avec cette nouvelle création les possibilités d’un espace sensible, entre un imaginaire commun et cénesthésique.

Un plateau vide, habité par seulement trois figures labiles, aux couleurs turquoises et chatoyantes, en quête d’une utopie commune : trouver et s’abandonner dans des espaces collectifs, visibles ou imaginaires, sécuritaires ou instables. Libérer le potentiel d’un terrain fertile, explorer la superficie et les volumes d’un espace propice aux fantasmes d’un paysage en devenir. Pénétrer le vide, déployer un imaginaire, y faire saillir des reliefs et les rendre palpables. En trois mots : trouver son paradis. Exaltées par des lumières lunaires et par un environnement sonore organique, les trois danseurs rendent compte d’une lente traversée sensible via plusieurs espaces de qualités identifiables. Les corps se font poreux et parviennent à dessiner des architectures éphémères dans lesquelles chaque spectateur peut projeter ses fantasmes, ils traversent des territoires flottants – une jungle tropicale, une manifestation urbaine, une surface visqueuse… – chacun identifiable par des corporéités singulières.

Le chorégraphe Kevin Jean continue d’explorer notre capacité à créer des fictions via des images dépouillées de sens. Avec Des paradis, il signe une pièce semblable à un eldorado contemplatif, véritable entonnoir à fantasmes.

Vu au Théâtre de Vanves dans le cadre du festival Artdanthé. Conception Kevin Jean. Avec Laurie Giordano, Kevin Jean et Bastien Lefèvre. Lumièr Sylvie Garot. Création sonore Ruben Nachtergaele. Photo Martin Argyroglo.