Photo Patroklos Skafidas

Elvedon, Christos Papadopoulos

Par François Maurisse

Publié le 15 mai 2017

Elvedon est la première création de Christos Papadopoulos, jeune chorégraphe athénien. Créée en 2016, la pièce est présentée une première fois à la Briqueterie à l’automne 2016, puis dernièrement au Théâtre des Abbesses dans le programme Chantiers d’Europe du Théâtre de la Ville. Ce chorégraphe, plutôt reconnu à Athènes, n’a été que rarement diffusé en France. Sa deuxième création, Opus, a notamment été présentée en Juin 2016 à Paris, dans le cadre du concours Danse Élargie, co-organisé par le Théâtre de la Ville et le Musée de la Danse à Rennes.

Quand la lumière s’allume sur le plateau nu, les spectateurs voient apparaître peu à peu des formes encore non-identifiées, éparpillées sur la scène. Ce sont en fait les six interprètes, pliés en deux, dos au public, qui offrent à leurs vues leurs fesses prises de soubresauts. À l’unisson, les corps sont comme agités d’un tremblement rythmé, binaire, la musique ressemblant au tic tac d’une horloge. Tout au long des quarante minutes du spectacle, on assiste alors au développement d’une chorégraphie minimale, les corps s’accordant entre eux et sur la musique. Comme d’abord agités par des sautillements, introduisant peu à peu des déhanchés, puis des petites marches sur place avant que les mouvements invitent les interprètes à la course pour un final pendulaire, pour lequel, se déplaçant à la manière d’un banc de poisson, les trajectoires dessinent des ellipses dans l’espace du plateau.

Le travail d’Elvedon se fonde sur le roman de Virginia Woolf, Les Vagues. Interrogeant les notions de collectif et d’individualité au travers de six monologues intérieurs fleuves se déroulant de façon enchevêtrée dans le roman, sur le modèle d’un récit alternant entre des écritures de soi et des passages de poésie en prose, ce roman d’apprentissage multiple utilise le procédé du courant de conscience pour déverser un langage rythmé à l’image du ressac des vagues déferlant sur la plage.

Sans s’appuyer sur le récit du roman, le chorégraphe Christos Papadopoulos semble se concentrer sur sa rythmicité particulière et sur l’effet de fédération produite par la musique et le mouvement des corps. Si les désynchronisations sont présentes dans la partition, il semble que ce soit plutôt la qualité chorale des mouvements qui prime. Cette danse tectonique évolue sans à-coups et invite un spectateur hypnotisé à faire l’expérience d’une temporalité particulière, distendue, le plongeant dans une écoute à la fois attentive et indolente, lui autorisant finalement aussi bien la rêverie que la fascination.

Vu au Théâtre des Abbesses, dans le programme Chantiers d’Europe du Théâtre de la Ville. Chorégraphie Christos Papadopoulos. Photo Patroklos Skafidas.