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Available Light, John Adams, Lucinda Childs & Frank Gehry

Par Wilson Le Personnic

Publié le 3 novembre 2015

Après avoir remonté ses dernières années Einstein on the Beach (1976) et Dance (1979), deux grandes oeuvres majeurs qui ont marqué l’histoire de la danse post-moderne, la chorégraphe américaine Lucinda Childs signe aujourd’hui la reconstruction d’une autre pièce emblématique de sa carrière : Available Light. Créée en 1983 à Los Angeles, cette pièce marquait la première collaboration de la chorégraphe avec l’architecture Frank Gehry et le compositeur John Adams. Présentée pour première fois au Théâtre de la Ville il y a trente deux ans, la pièce revient entre les murs du théâtre parisien et confirme le génie novateur de la chorégraphe américaine.

Déployé sur deux niveaux, le plateau accueille onze danseurs vêtus de body ou de justaucorps deux pièces, rouges, blancs ou noirs. À l’instar de la musique minimale de John Adams, la partition chorégraphique se construit par des crescendos et des changements de rythme, les bras sont tendus, les corps tournoient et découpent l’espace sans rentrer en contact. Exécutés par groupe, les gestes sont synchrones et se font écho de par et d’autre du plateau. Installés sur un deuxième niveau, deux ou trois danseurs dialoguent simultanément avec leurs partenaires en contrebas, la chorégraphie se démultiplie dans l’espace et renvoie indéniablement aux images de sa précédente pièce Dance où les interprètes dansaient devant une projection vidéo de Sol LeWitt. Des variations de lumières effacent et dessinent des ombres au sol, notre regard navigue avec admiration dans le décor de Frank Ghery, grande architecture métallique qui tranche avec les volutes colorées créées par les danseurs. L’écriture reconnaissable de Lucinda Childs est parfaitement mise en scène par les interprètes virtuoses au service d’un rouage chorégraphique rigoureux et captivant de par sa complexité et sa beauté plastique.

Pièce jubilatoire au sommet de trois arts, Available Light témoigne une nouvelle fois du talent révolutionnaire de Lucinda Childs. Alors que cette pièce s’apprête à faire une tournée mondiale et que Dance continue d’être représentée en Europe, la chorégraphe poursuit la résurrection de son répertoire personnel en transmettant à sa nièce Ruth Childs trois solos créés au début des années soixante : Pastime (1963), Carnation (1964) et Museum Piece (1965). Elle prépare également une nouvelle création qui s’annonce déjà passionnante avec le compositeur Philip Glass et le plasticien James Turrell.

Vu au Théâtre de la Ville, dans le cadre du Festival d’Automne à Paris. Chorégraphie de Lucinda Childs. Musique de John Adams. Scénographie de Frank Gehry. Lumière de Beverley Emmons et John Torres. Photo Craig T. Mathew.